Qualité de Vie à l’Ère Post-Covid. Épisode 3

Qualité de Vie à l’Ère Post-Covid. Épisode 3

Cet article s’attardera d’autant plus sur la situation Post-Covid, au sens post-confinement, et ses retombées en terme individuel et organisationnel. Comme nous l’avons expliqué dans le second article, le confinement a chamboulé nos valeurs que ce soit dans notre environnement familial ou dans notre rapport au travail.

Qualité de Vie à l’Ère Post-Covid : Entre Recherche de Sens, Réflexions Identitaires et Culture Organisationnelle 3/3

Dans le précédent article, nous avons montré les répercussions du confinement sur notre rapport au travail.  Le télétravail peut notamment être perçu comme une source d’épanouissement ou de souffrances. La notion de qualité de vie durant la période du confinement a profondément été bouleversée. Cependant, il apparaît qu’être en accord avec nos relations intra-interpersonnelles et avoir un bon équilibre personnel et de l’autonomie dans ses responsabilités permettent de contribuer au sens chez un individu.

Notre sortie de confinement a, quant à elle, montré une nouvelle relation à la mort. Une relation entre appréhension et peur dans nos relations interpersonnelles. Cette relation à la mort représente un des déterminants du sens selon Irvin Yalom et entraînerait des modifications sur le soi et notre identité. Notre qualité de vie se retrouve, ainsi, accentuée par ces réflexions identitaires dans le monde du travail avec l’identité organisationnel et, plus particulièrement, la culture d’entreprise.

Notre article sera composé de deux grandes parties. Une première orientée vers le sens de l’individu comprenant cette nouvelle relation à la mort et les concepts de soi et d’identité individuelle / organisationnelle. La seconde partie développera, d’un point de vue organisationnel, la question de la qualité de vie au travail par la culture d’entreprise. On y parlera de ses principaux déterminants. À savoir l’apprentissage ou encore le management et le leadership humanistes.

1. À l’ère post-Covid, Une recherche de sens avec une nouvelle relation à la mort et une réflexion sur les concepts de soi et d’identités

La Covid a conduit de nombreux individus à remettre en question leurs valeurs et routines familiales et de travail. Les nombreux morts dus à cette épidémie ont aussi renvoyé chacun d’entre nous à notre propre vision et relation à la mort. En effet, comme l’expose Chambry (2020), il existe désormais une peur de la mort. Elle est en lien avec une profonde méfiance et appréhension vis-à-vis d’autrui. Dans cette société qui croît en la possibilité de se rapprocher de l’immortalité, la Covid a été un profond rappel sur notre propre condition humaine.

Cette nouvelle relation à la mort représente justement un des déterminants dans la recherche de sens selon le psychiatre Irvin Yalom. La psychothérapie existentielle de Yalom (2013) expose quatre enjeux majeurs à prendre en compte. La peur de la mort et notre rapport à celle-ci qui possèdent un impact sur notre construction identitaire. La liberté avec des concepts comme la décision, l’agir ou encore la conscientisation de nos responsabilités. Enfin, l’isolement qui renvoie au fait que nous sommes livrés à nous-même. C’est pourquoi nous devons apprendre à être en lien avec ce monde.

Enfin, l’absence de sens dans notre vie est une caractéristique importante qui nécessite de consacrer du temps et de la réflexion. Yalom (1980, 2013) ajoute que certaines activités peuvent attribuer à un sentiment de finalité aux êtres humains : l’altruisme ; le dévouement à une cause ; la créativité.

Yalom propose une vision d’ensemble des angoisses fondamentales qui alimentent chez l’individu des « conflits existentiels ». L’analyse de ces conflits a été ébauchée au cours du xxe siècle par les travaux précurseurs de divers chercheurs. On peut citer A. Adler, V. Frankl, R. May sur le sens de la vie, de O. Rank sur l’angoisse de mort, ou encore d’E. Fromm sur la responsabilité.

Une nouvelle relation à la mort qui contribue à l’élaboration du soi

Cette recherche de sens avec cette nouvelle relation à la mort est contributive à l’élaboration du soi et de notre identité. L’humain est doté d’une conscience réflexive qui lui permet d’être conscient de soi et d’autrui, autrement dit la capacité de se penser. Cette représentation de soi construit notre image de soi qui est des fondements de notre identité. Cependant, cette image de soi s’appuie aussi sur le regard de l’autre. Et plus particulièrement au cours de l’enfance et de l’adolescence. Si l’image de soi est présente, nous participons aussi à créer un idéal de soi, un idéal de civilisation.

Cet idéal nous oblige à nous adapter à une certaine vision de notre monde. S’en rapprocher aide à améliorer les représentations de soi-même, ses processus motivationnels, ses conditions de vie. Toutefois, il existe toujours un écart entre la représentation et l’idéal de soi. C’est pourquoi il est nécessaire de développer une bonne estime de soi afin de palier et d’apprécier l’imperfection de son idéal. Sinon, des conséquences en terme de souffrances peuvent apparaître.

Construction de soi et concept d’identité

La construction de notre soi est directement en lien avec le concept d’identité. Définis par Claude Dubar comme : « Le résultat à la fois stable et provisoire, individuel et collectif, biographique et structurel, des divers processus de socialisation qui conjointement construisent les individus ». L’identité est donc une construction stable, mais aussi provisoire, car elle est susceptible au changement. Cette variation est tout à fait normale, on distingue et on parle alors d’identité biographique et d’actualisation. La première est liée à notre enfance avec un double processus d’accommodation et d’assimilation de notre éducation, notre milieu social, notre entourage. Durant cette période, ce processus de construction de l’identité biographique inscrit l’individu en tant que sujet et objet. La seconde commence à se créer vers l’adolescence et se poursuit tout au long de notre vie, avec nos expériences de vie qui passe par la sociabilisassions.

À l’inverse de l’identité biographique qui est principalement lié à l’enfance, l’identité d’actualisation est évolutive. D’où le principe d’actualisation de cette identité. Perregaux souligne cette construction comme « processus d’actualisation des faits, d’événements, de connaissances, de sentiments mis en mémoire ». En effet, vous ne serez pas la même personne maintenant et d’ici 3 ans, car vous aurez évolué en terme de connaissances, comportements et de soi. « L’expérientiel prend alors un autre statut et un autre sens».

Identité organisationnelle

Comprendre ces processus identitaires est nécessaire afin d’aborder la question de l’identité organisationnelle. Les aléas du changement, comme la situation avec la Covid, affectent à la fois l’espace et le temps de l’organisation. Ces changements viennent se heurter aux dynamiques identitaires des individus et des groupes qui y évoluent et s’y construisent.

L’identité organisationnelle est produite par quatre besoins psychologiques majeurs : l’estime de soi, l’auto-différenciation, la sécurité et le sens. La dynamique de l’identité organisationnelle se doit de maintenir un sentiment d’appartenance à l’entreprise et à ses valeurs. Pour ce faire, il faut nourrir l’engagement sociétal de l’entreprise, sa culture organisationnelle et l’engagement au travail. L’identification organisationnelle est donc l’intermédiaire entre l’action sociétale de l’entreprise et l’engagement de ses collaborateurs.

La prise de recul sur ces différentes formes d’identités a des effets bénéfiques sur la motivation et les stratégies d’apprentissage. Nous attarderons, pour cela, notre réflexion sur la culture d’entreprise qui solidifie ces trois identités d’un point de vue systémique.

2.  La culture organisationnelle à l’ère Post-Covid, entre management hybrides (proximité/distance) et un leadership porté vers l’apprentissage organisationnel.

Dans ce contexte d’incertitude, la culture d’entreprise constitue un facteur d’engagement, de sens, d’apprentissage et de motivation pour les salariés afin d’accompagner un changement organisationnel et culturel en adéquation avec cette réalité environnementale et sanitaire.

Il existe trois dimensions fondamentales, qui rejoignent la typologie de Hampden-Turner & Trompenaars, pour une bonne culture organisationnelle. La première se focalise sur la structure et la qualité des relations intra-interpersonnelle au sein de l’organisation. La seconde renvoie à l’esprit d’entreprise et au modèle managérial mis en place pour développer l’action et les relations cités précédemment. Enfin, la troisième dimension se rapporte à la relation au temps dans l’entreprise en comprenant le temps séquentiel pour des tâches effectuées une à une, tandis qu’avec un temps synchrone, plusieurs tâches sont réalisées en même temps.

Il a été constater que les organisations à forte culture d’entreprise ont su mieux résisté, s’adapter et rebondir à la première phase de la Covid-19 en obtenant de meilleures performances environnementales et sociales.

Cohérence organisationnelle et culture d’entreprise

La cohérence organisationnelle entre projet et culture d’entreprise apparaît d’autant plus importante en cette période pour préserver la proximité avec ses équipes, maintenir le sens commun et la qualité de vie. Afin que les entreprises prennent conscience de leur stabilité, pérennité, résilience et agilité, elles devront s’engager sur une focalisation de l’humain avec, notamment, la solidification des trois identités que nous avons préalablement décrite en première partie. Mais elles devront aussi s’attarder sur l’évolution de leur culture organisationnelle avec une éthique, des méthodes d’apprentissages organisationnels, un leadership humaniste et un management hybride entre proximité/distance.

La Covid a conféré une place importante au lien social et à la proximité, mais aussi à des problématiques de contrôle de la qualité de travail lorsque celui-ci se réalise à distance avec le télétravail. Les techniques de gestion doivent s’adapter à ce nouveau paradigme avec de nouvelles formes de travail accentuant la motivation et l’engagement des salariés. Ainsi, le management hybride entre accompagnement à distances et de proximité constitue un nouveau challenge pour les managers. Un des éléments à mettre en place pour ce type de management est de concilier et de faciliter les interactions humaines avec la technologie adéquate pour standardiser les méthodes de communication et de management tout en laissant une marge de manœuvre et de décisions quant à ces équipes.

La proximité relationnelle apparaît comme une réponse à la distance physique, le manager doit donc adapter son style de management et rester à l’écoute de ses collaborateurs avec une relation rassurante, exigeante et cohérente. Le levier principal du manager est sa communication transparente afin de donner du sens et de responsabiliser ses équipes tout en leur donnant de l’autonomie dans le partage des objectifs individuels et collectifs à atteindre.

Management hybride, leadership engageant et humaniste

Ce management hybride doit être accompagné d’un leadership engageant et humaniste. Le leadership peut se définir comme la capacité à conduire les individus ou l’organisation envers un but, un objectif, une culture organisationnelle. En effet, pour développer la culture organisationnelle, il est nécessaire d’avoir un leadership orienté vers l’apprentissage organisationnel afin d’améliorer les compétences, les capacités, le savoir-faire et savoir-être au sein de l’organisation, on parle alors d’upskilling.

L’upskilling ne comprend pas que la formation, mais porte plutôt sur une vision systémique visant à agir sur les modes de travail, de communication, le modèle managérial et le leadership. L’upskilling va permettre des apprentissages aux différents échelons de l’entreprise : individuel, équipe de travail et organisationnel. Ainsi, l’apprentissage organisationnel serait un atout d’adaptation à la situation de la Covid.

Les processus d’apprentissage

Les processus d’apprentissages représentent un enjeu majeur pour les organisations afin de développer des réponses ou schémas d’exécution rapides, systémiques et innovantes quant aux problématiques de l’environnement. Ces schémas sont ce que l’on appelle des apprentissages en simple boucle (modification des comportements), double boucle (modification ou adaptation des valeurs organisationnelle). Avec la Covid, nous sommes beaucoup dans le second schéma, car les solutions innovantes sont souvent en rupture avec les schémas déjà préexistants. C’est donc bien à la fonction RH ou à des intervenants externes (coach & consultant) d’accompagner ces transformations d’orientation des comportements et d’apprentissages.

Nous pouvons souligner comme missions, la définition et l’agencement des ressources, l’affectation du personnel et la mise en place des systèmes de rôles. Ces missions représentent un socle de base au développement de l’apprentissage organisationnel. L’organisation doit donc être un lieu d’apprentissage, d’expérimentation et d’adaptation pour les individus qui la composent afin que des valeurs essentielles émergent tel que l’interaction, la confiance, le contact, l’intégration et la solidarité. Ces valeurs représenteront un avantage majeur dans la réussite de l’apprentissage dans un monde Post-Covid.

Conclusion : Qualité de vie au travail et recherche de sens

Nous avons constaté avec cet article que l’environnement Post-Covid représente de multiples déterminants, autant individuels qu’organisationnel pour la qualité de vie et la qualité de vie au travail.

Individuellement, l’épidémie a conduit à une nouvelle relation à la mort avec des impacts identitaires. Si une prise de recul est réalisée sur ces éléments, il participera donc fortement à la recherche de sens.

D’un point de vue organisationnel, le développement d’une profonde culture organisationnelle est nécessaire pour s’adapter à ce contexte d’incertitude. Ces transformations devront s’attarder principalement sur un management hybride avec à la fois de la proximité accentuant le lien social et à la fois de distance avec le télétravail et un suivi de la qualité des missions des collaborateurs. Le second point majeur se focalisent sur la question du leadership en conduisant un apprentissage organisationnel cohérent avec la culture organisationnelle et permettant, ainsi, de développer les comportements, compétences et responsabilisé de ces collaborateurs.

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Bibliographie : qualité de vie au travail et recherche de sens

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Doctorant CIFRE - R&D Linkup Coaching
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