L’identité et le processus de construction identitaire

L’identité et le processus de construction identitaire

Dans cette nouvelle série d’articles, nous traiterons de l’identité avec, notamment, le concept du Soi. La construction identitaire est un phénomène complexe et multidimensionnel propre à chaque être humain. L’identité paraît souvent floue et confondue avec la personnalité, nous montrerons donc les distinctions entre ces deux concepts. Notre identité et la connaissance que nous avons de soi permettent de développer des stratégies identitaires. Dans les derniers articles de cette série sur l’identité, nous aborderons la notion de cohérence éthique et de son lien avec la quête de sens. Enfin, nous finirons cette série sur l’identité dans un contexte organisationnel.

La construction de l’identité : une réalisation de soi entre biographie et actualisation

Après avoir posé le contexte et défini le concept d’identité dans notre premier article, attardons-nous sur son construit. La construction identitaire est un processus qui se réalise avant notre naissance, durant notre enfance, notre adolescence et qui se poursuit tout au long de notre vie à des intensités et des rapports différents. En effet, la construction identitaire est un processus complexe qui se construit par notre identité biographique (environnement socioculturel, éducation). Mais elle évolue aussi tout au long de la vie. C’est ce qu’on appelle l’identité d’actualisation (actualisation des expériences de vie et de nos valeurs). Dans cet article, je vous propose d’analyser en détail le processus de construction identitaire. Nous montrerons que ce processus dynamique est marqué par un procédé d’identification qui comprend des ruptures et crises.

La construction de l’identité de l’enfant, un procédé d’identification biographique des rôles et des modèles   

Le processus de construction identitaire démarre avant même notre naissance avec la perception des parents sur l’enfant. Il existe dans l’imaginaire des parents une préconception de l’enfant avec une anticipation de sa construction. En effet, en fonction de plusieurs déterminants comme le sexe, le prénom, l’enfant s’inscrit dans une première forme d’individualisation (Marc, 2016).

Ce conditionnement prend forme lors de la naissance de l’enfant avec le discours familial qui va accompagner l’enfant dans l’interprétation de ses réactions, comportement et trait de caractère. Ce discours conduit aussi l’enfant à se projeter dans une image de son soi futur. Le discours apparaît ainsi comme un des prémices à la formation de l’identité chez l’enfant. Toutefois, l’enfant n’a pas conscience directement de son identité, ce n’est que progressivement avec la perception de son corps et des interactions dites précoces dans son environnement, qu’il acquiert un réel sentiment de soi (Marc, 2016).

Entre 1 et 3 ans, l’âge varie selon les recherches, l’enfant apprend à reconnaître son double dans un miroir. Ce mécanisme le renvoie, en tant que sujet distinct, à son image de soi par un procédé d’objectivation et d’appropriation.

  • L’objectivation est le fait que l’enfant appréhende son environnement extérieur.
  • L’appropriation consiste, pour l’enfant, à mettre en lien son apparence physique avec les expériences internes qu’il ressent.

Et cette étape comprend, par l’utilisation du « je », l’émergence du premier sentiment d’individualité subjective pour l’enfant.

L’identification des rôles et des modèles

Un des éléments majeurs de ce processus identitaire à l’enfance est l’identification à des modèles et rôles. Cette identification ne se fait pas seulement par les personnes et notre environnement, mais aussi par les normes auxquelles nous souhaitons adhérer. En effet, l’enfant grandit tout comme s’élargit son environnement et ses interactions, l’identification prend ici une conception plus large avec des déterminants comme : la classe sociale, groupe d’âge, club sportif, identité nationale (Marti, 2008 ; Marc, 2016).

Aux alentours de 7 ans, l’enfant développe son aptitude à se mettre à la place d’autrui et à caractériser le regard des autres. Il prend alors conscience de différentes identités liées aux relations qu’il entretient avec son environnement (enfant, élève, camarade de classe). L’identification se fera autant avec les groupes d’appartenances, que les références ou modèles qu’il souhaite intégrer. Ces différents rôles vont être intériorisés par l’enfant et conduire à construire son identité sociale avec une stratégie de projection de soi dans l’avenir (Marti, 2008 ; Marc, 2016). L’identité sociale va renvoyer aux attributs et aux statuts propres aux catégories sociales auxquels l’individu se réfère.

Selon Morin (1980), « L’identité constitue une sorte de bouclage indissoluble entre similitude et différence ».

La construction identitaire de l’adolescent et du jeune adulte, un procédé d’actualisation entre exploration et engagement        

Dans cette partie, nous développons les modèles théoriques du développement de l’identité chez l’adolescent et le jeune adulte. L’adolescence est marqué principalement par l’intériorisation et l’expérimentation de différents rôles sociaux.

Le développement de l’identité à l’adolescence comprend deux approches considérées comme des références majeures : le développement du concept de soi et l’approche théorique d’Erickson. Nous avons présenté dans notre premier article, les principaux éléments majeurs du concept de soi.

Dans la vision d’Erickson, l’identité regroupe des « éléments du passé (histoire personnelle), des caractéristiques du présent (besoins, traits de personnalité) et des attentes du futur. L’adolescent expérimente donc différents rôles sociaux avec un processus de questionnement et d’intégration de ses domaines de vie afin de développer une forme de flexibilité permettant l’intégration de l’individu dans la société et, individuellement parlant, une forme de bien-être et de confiance (Marti, 2008). On parle alors ici d’identité personnelle, celle-ci s’attarde sur deux notions, l’exploration et l’engagement (Marti, 2008). L’exploration est un processus de recherche rattaché à d’autres choix pour soi dans des domaines de vie (profession, religion, politique).

L’engagement

Quant à l’engagement, il fait référence à l’adhésion d’un ensemble de valeurs, but et croyances. L’identité personnelle apparaît donc comme un procédé d’exploration dans un premier temps qui conduit à des engagements individuels ou engagements possibles. Ces deux dimensions ont permis d’établir quatre statuts propres à la formation de l’identité (ajustement psychosocial) :

  • La réalisation identitaire (forte exploration et fort engagement)
  • La forclusion identitaire (faible exploration et fort engagement)
  • Le moratoire identitaire (forte exploration et faible engagement)
  • La diffusion identitaire (absence d’engagement).

La problématique pour l’individu est de se retrouver dans une phase d’indécision. Il peut alors être pourtant dans l’exploration de son soi, mais sans aboutir à des choix, des engagements personnels. Cette phase d’indécision peut malheureusement amener l’individu vers des conflits intériorisés, des problématiques anxio-dépressive (Lannegrand-Willems, 2012). Dans la même conception, on trouve des problématiques liées aux phases d’exploration qui sont qualifiées d’exploration ruminative. Ici, l’individu se retrouve bloqué dans des phases d’exploration en continu sans aboutir encore une fois à des choix finaux.

D’autres chercheurs sont en accord sur le fait que la réalisation identitaire à l’adolescence est une phase dont l’objectif est l’autonomisation (Lannegrand-Willems, 2012). Donc, dans la mesure où il participe à la construction de son identité personnelle, l’individu trouve un accord entre ses intérêts, ses valeurs, ses capacités et les opportunités présentes dans son environnement.

Conclusion : l’identité est un processus dynamique et évolutif

La construction identitaire de l’enfance à l’adolescence, c’est un parcours complexe et parsemé de plusieurs notions qu’il faut prendre en compte. L’identité personnelle et l’identité sociale représentent un socle aujourd’hui aux recherches sur l’identité en tant que processus dynamique et évolutif. Cependant, cette construction n’est pas sans risques, elle peut mener pour certains à des ruptures, des crises personnelles. Nous traiterons dans notre prochain article des risques, des conflits et des moyens de travailler sur cette identité.

Bibliographie

Arnaud, B. & Mellet, É. (2019) Outil 2 : Être en accord avec ses valeurs, Dans : B. Arnaud & É. Mellet (Dir), La boîte à outils de la psychologie positive au travail (pp. 18-21), Paris: Dunod

Lannegrand-Willems, L. (2012) Le développement de l’identité à l’adolescence : quels apports des domaines vocationnels et professionnels ? Enfance, 3, 313-327, https://doi-org.ezpaarse.univ-paris1.fr/10.3917/enf1.123.0313

Marc, E. (2016). La construction identitaire de l’individu. Dans : Catherine Halpern éd., Identité(s): L’individu, le groupe, la société (pp. 28-36), Auxerre: Éditions Sciences Humaines https://doi.org/10.3917/sh.halpe.2016.01.0028″

Marc, E. (2005) Psychologie de l’identité, Paris, Dunod

Marti, P. (2008) Identité et stratégies identitaires. Empan https://doi.org/10.3917/empa.071.0056

Marti, P. (2003) « Quel temps pour la trans- mission ? », Jeunesse et générations, jeunesse et transmission, Empan, n° 50, p. 12-13, Toulouse, érès

Morin, E. (1980) La méthode 2. La vie de la vie, Paris, Le Seuil

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