Le coaching ontologique – Tour d’horizon #5

Le coaching ontologique – Tour d’horizon #5

Qu'est-ce que le coaching ? Pour cette année 2022, on a décidé de revenir à la base en se posant cette question simple. L'une des manières de répondre, c'est de présenter les différents courants qui existent en coaching. Et également de vous expliquer leurs spécificités. Bienvenue dans notre nouvelle série : tour d'horizon des coachings. Aujourd'hui : le coaching ontologique.

Comme l’approche existentielle, ce type d’approche est plus théorique et moins pratique, mais elle a des applications très concrètes que beaucoup de coach·es connaissent. L’idée principale ici, c’est que la manière dont on se représente le monde est la raison de nos actions. Résultat en coaching : on s’intéressera particulièrement à la structure de représentation et d’interprétation de la personne. En d’autres mots, on va travailler sur les fameux CVB… (croyances, valeurs, besoins). Le but principal d’une telle approche en coaching, c’est d’accompagner les client·es à réaliser que leur identité est le résultat d’une multitude de croyances, de valeurs, de représentations. Et que cette multitude est changeante. On parle parfois de plasticité structurelle, ou encore de restructuration cognitive. À partir de là, l’accompagné·e bénéficie d’un espace dans lequel il ou elle peut réfléchir à ce qu’il ou elle est et à ce qu’il ou elle veut être.

L’ontologie, [c’est] l’explication des structures d’être de l’existant pris comme totalité

Jean-Paul Sartre, 2001 (1943) L’Être et le Néant, Gallimard, coll. « Tel », p. 337.

L’approche ontologique du coaching : bases théoriques et pratiques

Pour le dire plus simplement que Sartre, l’ontologie, c’est l’étude de l’être (ontos = étant, ce qui est, être ; logos = étude, discours, traité). L’approche ontologique est liée à l’approche existentielle parce qu’elle a un lien fort à la philosophie existentielle. Et à plusieurs de ses branches, comme la phénoménologie (voir le tour d’horizon #4 ) et la philosophie analytique. Le principes de base d’une telle approche est très simple :la manière dont nous voyons le monde détermine nos actions. Et en coaching, la manière dont on voit le monde, on appelle ça une représentation. Or, c’est justement la structure des représentations des client·es que l’on met en avant dans une approche ontologique du coaching. Et enfin, pour produire une représentation, il faut faire acte d’interprétation. On récapitule :

  • Les acteurs : une personne, un environnement
  • Les actions : la personne interprète sont environnement, et elle construit à partir de cette interprétation une représentation particulière. Une carte du monde si on veut.

L’importance et la provenance de l’interprétation en coaching

Or, l’interprétation, ce n’est pas quelque chose de neutre. Pourquoi ? D’abord, parce que nos interprétations ne sont, pour la plupart, pas conscientes. On pourrait presque dire qu’elles sont héritées. Nous grandissons avec un ensemble de croyances, de valeurs, de comportements, qui nous est transmis. Une sorte de grille de lecture. Le concept habitus de Pierre Bourdieu est un bon exemple de ça.

Deuxièmement, nos interprétations ne sont pas seulement linguistiques. C’est-à-dire qu’elles ne sont pas uniquement le fruit d’une conceptualisation vocale. Nos interprétations, ce sont également le fruit de nos expériences émotionnelles et somatiques. Cette tripartition est très importante dans l’approche ontologique du coaching, parce qu’elle structure les actions d’accompagnement.

La triade langage – corps – émotions

Les éléments de langage qui structurent nos représentations sont des phrases, souvent des expressions toutes faites. La manière dont les drivers se développent et se renforcent en sont un excellent exemple. De manière plus générale, la langue dans laquelle nous nous exprimons nous fournit également un cadre pour penser et pour être. C’est la raison pour laquelle la langue est très souvent un champ de ce qu’on appelle aujourd’hui la bataille culturelle. Dans la culture populaire, le livre 1984 de George Orwell est un bon exemple d’utilisation de la langue pour encadrer les représentations de chacun.

Notre corps est un vecteur d’expression. Ça paraît complètement banal, mais la manière dont nous nous déplaçons et dont nous occupons l’espace en dit long sur nos représentations du monde et sur notre état présent. Le mansplaining en est un très bon exemple. De manière plus simple et plus quotidienne pour les coach·es, un·e client·e qui croise les bras, qui se voûte ou, au contraire, qui parle en écartant les bras et en se tenant bien droit nous en dit beaucoup.

Les émotions dans le contexte d’un coaching ontologique, c’est ce qui nous prédispose à agir. On va donc chercher à les déceler avec nos client·es pour mieux comprendre les comportements, les croyances, les valeurs qu’ils nous présentent.

L’importance de la reconstruction

Cette triade langage – corps – émotions, elle est importante en coaching parce qu’elle permet de montrer à nos client·es que ce qu’ils sont, et ce qu’ils font, n’est pas inné. En d’autres mots, notre identité est plastique. Ce que nous avons appris, nous pouvons le désapprendre et personne n’est condamné à être qui il est à un moment donné. Le but du coaching, c’est justement d’offrir un espace de redéfinition du soi. Comment ?

En « générant de nouvelles possibilités, jusqu’alors invisibles ou inaccessibles, qui permettront à de nouveaux apprentissages et de nouveaux comportements d’émerger » (Palmer & Whybrow, 2019 2nd ed., Handbook of Coaching Psychology, p.219)

L’approche ontologique en pratique

L’approche ontologique en pratique, c’est une structure générale du coaching qui permettra aux client·es d’explorer leur construction identitaire (étudier leur être en d’autres mots) puis de créer un espace de transformation au besoin pour faire émerger la possibilité d’un changement. On y retrouve évidemment les bases à beaucoup de coachings :

  • Créer les conditions de l’enquête (instaurer le rapport collaboratif)
  • Observer et enquêter le système client·e pour comprendre son état
  • Pratiquer l’écoute active
  • Faire ressortir les structures d’apprentissage et de représentations qui expliquent l’état actuel et, possiblement, l’état problème qui justifie le coaching
  • Accompagner les client·es dans de nouvelles pratiques : apprendre à dire non, oser demander une augmentation, oser être moins parfait, oser s’affirmer, oser s’expatrier, etc.

Les trois premiers éléments sont assez généraux en coaching. Dans le quatrième, on est assez clairement dans une approche ontologique puisque le but, c’est d’accompagner une reconstruction identitaire et cognitive. Et pour ce faire, il faudra déconstruire l’état actuel de la personne.

Le cas particulier du corps et de l’expérience en coaching

On l’a vu plus haut, le corps est l’un des trois éléments sur lesquels il est possible d’enquêter pour comprendre l’état d’un·e client·e. C’est également l’un des espaces de transformation que l’on peut investir (ici on parle de comportements bien sûr, pas de chirurgie esthétique). Le corps en tant qu’espace de transformation, c’est un concept au centre de ce qu’on appelle la pratique somatique.

La pratique somatique, c’est l’ancrage par l’expérience. À force de faire quelque chose, on l’intègre à notre identité. Et par la pratique d’une activité différente de notre quotidien, il est possible de restructurer nos habitudes cognitives (voir Price, D., Verne, N., & Schwartz, J.M. (2006). Plasticity in Brain Processing and Modulation of Pain. Progress in Brain Research, Vol. 157). On retrouve ici le 5ème point : accompagner dans de nouvelles pratiques.

Or, cet accompagnement est fondamental et déterminant. En effet, plusieurs auteurs ont montré que la simple répétition d’une pratique ne suffisait pas à la restructuration cognitive. La pratique en question doit faire l’objet d’un alignement. En d’autres mots, elle doit nous correspondre et être le résultat d’un choix conscient et construit. On retrouve ici l’importance du coaching : il permet justement de déterminer ce qui est important ou non, et donc ce qu’il convient de poursuivre et ce qu’il convient d’abandonner.

Conclusion

L’approche ontologique, parce qu’elle met au centre de l’accompagnement l’être et l’identité de l’autre, est très puissante. Mais attention, on est clairement dans une pratique potentiellement choquante et menaçante pour la sécurité ontologique des client·es. Dès lors, ce type de coaching ne peut se justifier que si les client·es sont prêt·es et en demande d’une telle reconstruction. Pour des demandes plus objectivées et »superficielles », une telle enquête en profondeur ne se justifiera pas.

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