Dans cette nouvelle série d’articles, je vous propose d’aborder les pratiques et mécanismes du coaching, ces répercussions, ces valeurs ajoutées, mais aussi ces critiques. L’ensemble de ces éléments nous permettront, dans une perspective de recherche, d’avoir un bon état des lieux de la représentation actuelle du coaching.
Alors qu’est-ce que le coaching ? Quelles contributions cette pratique offre-t-elle ? Quels en sont ces mécanismes et comment s’opérationnalisent-ils ?
Si les pratiques de coaching ont longuement été débattues, elles n’en demeurent pas moins basées sur une charte éthique avec un comité d’éthique et de profondes théories et champs disciplinaires des sciences humaines et sociales. Plusieurs outils sont à la disposition du coach, comme l’analyse transactionnelle ou l’approche systémique, permettant d’inscrire le coaché dans une perspective de changement. Ce dernier va être amené à mobiliser ses propres éléments cognitifs (réflexion), ses affects et son intentionnalité afin d’aboutir à ses objectifs et donc à une évolution ou un changement dans le cadre de sa relation intrapersonnelle (avec lui-même) ou interpersonnelle (avec autrui). En effet, le coaching étant axé sur l’unicité de l’individu en tant que développement personnel, il sera intéressant de mettre cette pratique en exergue avec certains concepts comme la résilience et la quête de sens. Bonne lecture à tous, et au plaisir d’échanger en commentaires.
Afin d’entamer notre réflexion, il apparaît nécessaire de définir ce qu’est le coaching et quelles en sont ses finalités. Comment le caractériser ? Quels sont ses rôles dans les organisations ? Quels liens entretient-il avec la performance ?
D’un point de vue professionnel et pratique, le manifeste du coaching (2020) définit ce métier, discipline des sciences humaines et sociales, comme un accompagnement des individus, des équipes et des organisations dans la définition et l’atteinte de leurs objectifs d’évolution, de développement, de décision, de transformation et de réalisation dans le respect des principes éthiques du Comité d’Éthique du Coaching.
Le monde académique s’est également penché sur la question. Brabet (1993) explique qu’il existe trois paradigmes en gestion des ressources humaines : le modèle instrumental, le modèle de l’arbitrage et le modèle de la gestion des contradictions. Fatien (2008) affirme que le coaching se classe majoritairement sur le premier modèle, mais également le second. C’est-à-dire que le coaching se caractérise par la convergence des recherches vers une rationalité efficace tout en prenant en compte la dimension politique et culturelle des organisations.
Fatien (2008) réalise une analyse de contenu (44 sites internet et 53 définitions) sur le coaching et montre qu’elle comprend un socle de base. En effet, cette pratique d’accompagnement est mise en avant dans l’adaptation des individus à un contexte en perpétuel changement. Cette idée d’adaptation au changement est particulièrement notable dans le coaching et fera donc office d’un article plus détaillé dans cette série.
Le coaching a souvent été confondu avec d’autres formes d’accompagnement comme l’expertise, le conseil et le mentorat. Pour plusieurs auteurs (Bayad et al., 2009), on peut caractériser le coaching par une quête d’autonomie basée sur le savoir de l’individu lui-même.
En effet, le coach amène un individu à réfléchir sur les propres éléments de sa réalité et de son environnement. Pour ce faire, le coach fait appel à des éléments cognitifs comme la réflexion et la mémoire afin de conduire son client vers une meilleure compréhension d’une situation problématique ou d’un développement personnel choisi.
Le coaching : rôles et fonctions
Les entreprises ont recours au coaching lorsqu’elles rencontrent diverses situations problématiques d’ordres individuel, relationnel, managérial, organisationnel ou encore stratégique. Poilpot-Rocaboy et Charpentier (2010) répertorient plusieurs exemples de cas de coaching de cadres : besoin de développement personnel, besoin d’améliorer ses possibilités de carrière, besoin de mieux gérer sa carrière, besoin de mieux gérer le changement, besoin d’accroître sa légitimité.
Nous constatons que le coaching apparaît comme un outil d’apprentissage organisationnel et personnel (Bono et Al, 2009) facilitant les changements comportementaux souhaités (Persson et Rappin, 2015). Vernazobres (2008) explique que le coaching et les changements qui peuvent s’opérer sont induits grâce à des zones ou des moments de régulation autonome chez l’individu propre au lien qui s’effectue entre le coach et le coaché.
Le métier de coach s’articule autour de trois domaines à savoir le coaching d’organisation, le coaching d’équipe et le coaching individuel. Il existe donc de multiples types de coaching à commencer par le coaching interne et externe à une entreprise. Sue-Chan et Latham (2004) affirment dans leurs études que les coachs externes seraient plus efficaces que les coachs internes dans un cadre de conduite de changements de comportements dans une équipe.
Les compétences nécessaires que le coach devra assimiler et maîtriser sont :
- L’analyse du besoin de ses clients et l’élaboration d’un plan stratégique d’intervention
- La mise en œuvre de l’ingénierie de coaching d’organisation, d’équipe et d’individu
- L’évolution de sa pratique tout au long de son activité en concevant des outils de diagnostics et d’intervention innovants et adaptés aux situations rencontrées
- Le développement continu de ses compétences en réponses aux enjeux socioéconomiques contemporains
- La promotion du métier en faisant valoir son expertise
Comme toute discipline scientifique, le coaching a évolué et s’est adapté au fur et à mesure des recherches. Cette évolution est primordiale pour cette pratique qui vise à accompagner les transformations des individus dans des contextes complexes. C’est ainsi que le coach se voit, aujourd’hui, interagir avec différentes avancées sociétales telles que :
- La place des femmes et des hommes dans les organisations et la société
- La Qualité de Vie au Travail (QVT)
- La prise en compte des Risques Psycho-Sociaux
- L’importance du Sens au travail
- La dimension humaine du management
- La Responsabilité Sociétale des Entreprises (RSE)
- Le développement des compétences
- La pérennité et la performance des organisations
- Le développement du capital social et culturel des entreprises
Coaching et performance
Les liens entre coaching et performance effective ont fait l’objet de nombreuses recherches, toutes cherchant à répondre à une question d’apparence aisée : le coaching est-il efficace ?
De nombreuses études, pour la plus grande partie dans le monde anglo-saxon et dans un contexte organisationnel, tendent à montrer que la réponse tient en trois lettres : OUI (Grant & O’Connor, 2010 ; Theebom, Beersma & Van Vianen, 2013). Le développement des personnes, équipes et organisations a été souligné par Morin (2010) puis Vernazobres (2013) comme un puissant outil dans la mesure où il admet une perspective stratégique et systémique. Ces questionnements sur l’efficacité d’une approche systémique en coaching donnera lieu à un article plus détaillé dans cette série.
Bibliographie
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Vernazobres P. (2013) : La valeur ajoutée du coaching – Pour un développement managérial et organisationnel, Paris, de Boeck.
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