La résilience organisationnelle (CR de Recherche #1)

La résilience organisationnelle (CR de Recherche #1)

Salut à tous·tes ! Je suis très heureux de vous présenter notre nouvelle série : les comptes-rendus de recherche (CR de recherche pour les intimes). Le but ? Vous proposer régulièrement une vue directe sur la recherche en sciences sociales et faciliter votre travail de veille si vous êtes coach·es ou managers. Ces articles prendront donc la forme de comptes-rendus des conférences auxquelles j'assiste au cours de mon doctorat en sciences de gestion. Bonne lecture !

Une conférence sur la Résilience

L’atelier de Recherche de la Chaire Risques de l’IAE Paris-Sorbonne a organisé une conférence sur la résilience. À cette occasion, Gilles Teneau était invité pour aborder ce concept et présenter ses travaux. Gilles Teneau est chercheur associé au LEMNA (Université de Nantes – CNRS). Il est président Fondateur de CIRERO (le Centre de Recherche en Résilience des Organisations), directeur des cahiers risques et résilience (C2R) et membre du conseil scientifique du congrès mondial de la résilience. Bref, c’est un interlocuteur de choix quand on veut parler de résilience.

Lors de cet atelier, Teneau a effectué un état de la recherche sur la résilience organisationnelle. Il a également proposé une mise en pratique du concept, en parlant du COVID. Ces derniers ouvrages traitent des origines de la résilience organisationnelle et de la transilience (transformations par la résilience). Cette article a pour objectif de présenter les grands points de cet atelier. Bonne lecture à tous·tes.

La résilience : qu’est-ce que c’est ?

Résilience provient de l’anglicisme « resilir, resiliar » qui signifie « reculer pour mieux sauter ». La résilience c’est donc la capacité à vivre et à se développer en surmontant les chocs traumatiques et l’adversité. Teneau présente les principales définitions psychologiques de la résilience comme…

  • la capacité d’un processus d’adaptation de réponse des individus, d’anticipation de l’environnement, de redéploiement des ressources pour faire face au stress ou une crise tout en s’ajustant
  • la capacité de rebondir face à des perturbations dans un environnement complexes.

La particularité de la résilience est qu’elle permet d’agir dans des environnements de crise. Cela peut-être un état de crise individuel, collectif ou organisationnel. Si une crise est présente, il y a un avant, un pendant et un après. Et le processus de résilience peut être envisagé à chacune de ces étapes. Teneau prend l’exemple de la crise sanitaire avec le coronavirus, il y a bien eu un début, un pendant et une métamorphose. D’autant plus que cette crise sanitaire admet d’autres crises associés : politique, sociale, économique.

La résilience organisationnelle (RO)

Appliquer la résilience à une organisation, un système, une institution, une collectivité a vu le jour avec les travaux de Malak fin 90 début 2000 avec le concept de résilience organisationnelle (RO). Ses origines proviennent des questionnements liés à l’identité organisationnelle. Teneau explique qu’une organisation est représentée par sa structure, son entité, sa stratégie et son management. Et également par les hommes qui la composent et par sa culture d’entreprise.

Lorsqu’une crise arrive, elle peut toucher une ou plusieurs de ces caractéristiques. Voire toutes en même temps et provoquer des risques d’effondrement de l’organisation. Par conséquent, l’entreprise doit y faire face. Elle peut le faire avec l’aide de nouvelles technologies et stratégies. Le but : s’adapter et évoluer face à ces changements.

Teneau définit ainsi la résilience organisationnelle comme…

« la capacité d’un système (individu, collectivité, organisation), confronté à des événements fragilisant et déstabilisant, voire catastrophiques de mobiliser ses ressources en vue de rester en lien avec sa finalité et se projeter dans son futur ».

La RO permet à une entreprise de s’adapter tout en apprenant et développant ses ressources (McManus, 2008 ; Séville et al., 2006 ; Ungar, 2009). Actuellement, les recherches portent sur ces ressources en tant que processus collectif pour soutenir le bien-être lors de traumatismes organisationnels (Panter-Brick, 2013, 2014). La capacité de ces ressources est mise en avant dans les styles de management résilients. Ce management développe la capacité à se dépasser face à une crise en faisant les choses différemment.

Le COVID : un exemple de résilience ?

Par exemple, le coronavirus a conduit les organisations à recourir au télétravail. Cette pratique comprend de nombreux avantages aujourd’hui tandis que celle-ci n’aurait pas été forcément accepté ou totalement toléré au sein des organisations et selon les différents corps de métier avant la pandémie. Ces périodes permettent de nouvelles perspectives avec de nouveaux intérêts. La résilience conduit ainsi à des interrogations sur la ou les meilleures décisions à entreprendre. La situation avec le coronavirus au début était surtout de la surprise et du choc. On a ensuite observé un état adaptation, à condition qu’il y ait une finalité, un but ou un objectif pour les acteurs concernés. En résumé, Les organisations qui ont un but et des objectifs clairs et définis arriveront plus facilement à se projeter dans le futur.

Le deuxième enseignement, c’est que la mise en place de conditions favorables à la résilience avant la crise permettra de mieux la comprendre. De nombreuses recherches confortent l’idée que mettre en œuvre des mesures de résilience avant la crise permettrait une meilleure gestion et survie de l’organisation face à la crise. L’approche par la résilience organisationnelle opère comme une ressource pour activer des conditions d’homéostasie.

Les trois moments de la résilience organisiationnelle

La majorité des travaux antérieurs sur la RO proposent d’intégrer une résilience axée sur la stratégie et la structure organisationnelle comme moyen d’intervention face aux turbulences (Mallak, 1998 ; Weick, 1995 ; Woods, Hollnagel, 2006 ; Madni, 2007). Gilles Teneau et d’autres ont décidé, quant à eux, d’orienter leurs recherches sur les ressources humaines et donc l’individu (Séville, 2006 ; Folke, 2006 ; McManus, 2008 ; Koninckx, 2009). En effet, une organisation n’est pas faite, uniquement, de stratégies, mais aussi d’individus qui gravitent et évoluent autour de l’organisation. Pour le bon fonctionnement de l’organisation, il faut donc que les individus qui la composent soit aussi « solides ». Et cette solidité est permise par la gestion du bien-être au travail.

Dans cette perspective, Teneau distingue trois moments :

  • L’analyse des risques, la connaissance de la situation, la sensibilisation, la préparation à la crise, l’anticipation
  • Le fait de répondre aux turbulences, la réponse résiliente, la capacité d’adaptation et la réactivité
  • La prise de décision, le rebond, la mise en œuvre des éléments de récupération, la surveillance, l’apprentissage organisationnel

La Transilience

Dans la seconde partie de la conférence, Teneau développe le concept de transilience. La transilience, c’est la transformation par la résilience. Elle permettrait l’émergence d’une théorie de la résilience organisationnelle qui n’est pas présente dans les recherches actuelles.

Pour Teneau, il y a de multiples formes de transilience :

  • 1) La première forme se caractérise par l’intensité des facteurs contextuels causées par les interactions dans l’environnement et les processus évolutifs.
  • 2) La seconde forme de la transilience s’attarde sur le changement et l’innovation
  • 3) La troisième forme va permettre d’intégrer de nouveaux aspects, de nouvelles mutations et relation.
  • 4) La dernière forme s’apparente à une théorie générale de la résilience, une transdisciplinarité des résiliences.

Première forme de la transilience

Dans sa première forme, la transilience fait office de réflexion épistémologique sur le concept de résilience. L’organisation cherche à mieux comprendre l’impact du contexte, de la contingence et de l’environnement mouvant. Cette étape, se caractérise par le franchissement d’une barrière sélective. C’est-à-dire qu’un schéma représentationnel de l’organisation va se transformer en un schéma transformationnel. Un des facteurs principaux à cette modification de l’environnement est l’identité organisationnelle. Cette dernière est déterminé par sa structure, sa stratégie et les humains qui la composent. Globalement, on parle de la forme du management et de la culture d’entreprise.

Deuxième forme de la transilience

Dans une seconde phase, le changement est le moteur de l’innovation. Les individus créent les conditions d’une performance améliorée en mobilisant différents leviers du changement comme la structure, la culture et la stratégie de l’organisation.

Troisième forme de la transilience

Dans sa troisième forme, les éléments du changement touchent aux valeurs des individus et les inscrivent dans une transformation stratégique. On parle alors de nouvelles valeurs et de nouvelles manières d’envisager l’activité. Les individus s’intéressent, ici, aux différentes formes de résiliences. La forme individuelle, la forme collective et la forme organisationnelle. Chacune aura un rôle à jouer en tant que posture transdisciplinaire afin de mieux comprendre les crises d’aujourd’hui et les environnements complexes.

Quatrième forme de la transilience

Enfin, à chaque forme de résilience sera associée une stratégie adéquate. Le temps de mise en place sera variable selon les stratégies pour arriver à un modèle de maturité de la résilience. Dans un temps court, il s’agira de s’attarder sur la structure organisationnelle et identitaire de l’organisation. Tandis que dans un temps long, ce sera la culture d’entreprise qu’il faudra aborder. En effet, il est plus facile de modifier le management et les comportements au sein de l’organisation plutôt que la culture de celle-ci.

Pour conclure

Tout ce processus dynamique peut admettre des ruptures et risques d’effondrements. D’où l’importance de travailler sur la résilience dans l’avant crise. Les crises d’identité organisationnelle impactent les individus et peuvent les conduire à une crise d’identité individuelle. Avec donc une modification de leurs valeurs et de la culture d’entreprise. Le concept de transilience permet donc d’unir toutes les résiliences. Selon Teneau, c’est en cela que la transilience conduirait vers une réflexion de la théorie de la résilience basé sur un réalisme critique. C’est-à-dire un champ du possible qui émerge de l’intuition, de l’imaginaire des individus pour faire face à l’ambiguïté et « faire le bon choix ».

Teneau constate qu’il existe différentes réactions des organisations selon les formes de résilience de celles-ci. Les organisations de type robuste commencent à mettre en place des concepts comme l’intelligence collective, la résilience organisationnelle ou l’intelligence émotionnelle.

En résulte selon Teneau, les résiliences de type 1, l’organisation arrive à faire face à la crise et au moins revenir à son système initial. Les résiliences de type 2 ont, au préalable, mis en place des conditions de résilience avant la crise pour détecter les signaux faibles et dangers éventuels. L’organisation bénéficie donc du choc de la crise pour que le système se transforme dans sa globalité (Transilience d’un point de vue micro, macro, méso).

Pour en savoir plus…

Les Toxic handlers

En fin de conférence, Teneau nous amène à réfléchir sur les toxic handlers, autrement dit absorbeur de souffrance ou générateur de bienveillance. Les toxic handlers jouent un rôle important dans la résilience, car ils sont ceux qui la portent. Teneau constate que certaines personnalités sont porteuses de « bien » aux autres lorsqu’il y a des difficultés ou des crises à affronter. Plus d’explication disponibles sur le site de la résilience organisationnelle.

« Le fait que l’on puisse s’épanouir ou souffrir en entreprise dépend de très nombreux facteurs. L’un d’entre eux a été peu étudié jusqu’ici : la présence des générateurs de bienveillance. Et ceux-ci font bien plus que venir en aide : ils incarnent l’indispensable humanité dont nulle entreprise, ni communauté humaine, ne saurait se passer. » Christophe André, Article du Figaro au sujet de l’ouvrage Toxic Handler de Gilles Teneau et Géraldine Lemoine.

« Empathiques et altruistes, ces individus sont capables d’améliorer la qualité de vie au travail, le stress ou atténuer les souffrances. » Ces individus peuvent donc redonner confiance à autrui, redonner confiance aux changements. Avec leur capacité d’écoute et d’empathie, ils sont aussi capables de redonner du sens à certains. Il apparaîtrait que ces porteurs de la souffrance sont proches des gens qui font des burn-outs.

Le MIRO

La mise en place de cellule de résilience est primordiale pour avoir un baromètre de l’organisation et de ce qui s’y passe. L’intervention d’un nombre d’acteurs différents et de porteurs de la résilience dans cette cellule joue un rôle opérationnel dans la mise en place d’une transformation organisationnelle. Plusieurs outils seront à la disposition de ces cellules de résilience.

L’objectif de l’association CIRERO est de fédérer des chercheurs et praticiens de la résilience appliquée aux organisations. Ils proposent leur propre modèle de mesure de la résilience organisationnelle, le Miro. Un questionnaire de 81 questions évaluant sur une échelle de mesure de 1 à 10 différents indicateurs de la résilience organisationnelle. Ce modèle permet de positionner l’état de résilience d’une organisation à un moment donné et de repérer vers où l’organisation dirige son évolution.

Le modèle de CIRERO, représenté ci-dessous, indique un état de résilience selon trois composantes : le Management, la Structure, la Stratégie. Ces composantes permettent de faire émerger quatre cadrans, états de la résilience organisationnelle : Le cadran supérieur gauche représente l’organisation résiliente Le cardan supérieur droit représente une organisation fortement résiliente Le cadran inférieur gauche représente une organisation non-résiliente Le cadran inférieur droit représente une organisation faiblement résiliente.

Plus une organisation est résiliente, plus elle se situe en haut et à droite du modèle CIRERO, moins l’organisation est résiliente et plus elle se situe en bas à gauche du modèle. Vous pouvez retrouver le modèle explicité en cliquant sur cette phrase.

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